En 1979, le groupe Sister Sledge sortait son tube « We Are Family », que l’équipe de Mon Partenaire Patrimoine aime beaucoup ! Il y est notamment question « d’avoir la foi dans ce que tu fais, tu ne peux pas te tromper c’est notre bijou de famille ».
Et c’est bien cela que les thuriféraires des entreprises familiales nous vendent : une surperformance dans la durée des entreprises détenues et dirigées par des familles.
Si c’est vrai que les entreprises familiales surperforment, alors c’est une bonne thèse d’investissement. Mais commençons par le commencement : c’est quoi une entreprise familiale ?
Traditionnellement, on appelle une entreprise familiale une entreprise détenue significativement par la famille de son ou de ses fondateurs historiques, que ce soit en direct, via une holding ou une fondation. Selon les études, on parle de détention majoritaire ou minoritaire ; mais il y a un consensus de marché pour dire que si une famille contrôle directement ou indirectement plus de 10% du capital ET que le poids de la famille est important dans la gouvernance (droits de vote, conseil d’administration, direction effective), on est en présence d’une entreprise familiale.
Venons-en au fait : les entreprises familiales génèrent-elles de la surperformance pour les investisseurs ?
Oui … Mais.
De très nombreuses études disponibles sur la question démontrent une surperformance des entreprises familiales. Mon Partenaire Patrimoine en a sélectionné trois particulièrement sérieuses :
Tout d’abord l’indice « Credit Suisse Family 1000 », qui regroupe 1.000 entreprises familiales cotées. Il est mis à jour tous les ans depuis sa création en 2006, et ses conclusions chiffrées sont sans appel sur leur surperformance :
- surperformance boursière moyenne de 3 à 4% par an
- moindre endettement, plus de génération de cash => plus d’autofinancement
- meilleure résilience dans les crises
- plus d’efforts de R&D
- meilleure rétention des collaborateurs
Ensuite une étude de Pictet Asset Management limitées aux secteurs industrie et distribution, qui date d’il y a six mois. Cette étude nuance un peu, mais conclut, elle aussi, à une surperformance des entreprises familiales :
- meilleur parcours boursier que les pairs non familiaux
- fondé sur une croissance du bénéfice par action supérieure, liée à un moindre endettement et à une stratégie de croissance organique plutôt que par acquisition
- avec, au final, des marges opérationnelles et une rentabilité des capitaux supérieures
- vrai sur tous les continents, et particulièrement en Europe et en Asie
Enfin une étude de la Société Générale, elle aussi de 2021, montrant une surperformance des entreprises familiales européennes depuis 2015 par rapport à l’Eurostoxx 600, avec trois facteurs clés de succès mis en exergue :
- une vision claire
- une capacité à assumer les conséquences défavorables à court terme des décisions nécessaires à la pérennité de l’entreprise pour un bénéfice à plus long terme
- la stabilité de la gouvernance dans le temps
Ces études convergentes ne concernent que les entreprises cotées.
On dispose de moins de data sur les entreprises non cotées. Il y a cependant d’autres études incluant les entreprises familiales non cotées, comme la Global Family Business Survey de Deloitte ou encore des études sur la performance des entreprises selon que le dirigeant est issu de la famille ou non. En général, elles concluent, elles aussi, à une surperformance comptable par rapport aux entreprises comparables non familiales.
C’est presque trop beau pour être vrai, nous direz-vous ?
Et vous avez raison. Si c’était la panacée, toutes les entreprises seraient familiales, et les entreprises non familiales ne trouveraient pas d’investisseurs. Il y a des risques. Entreprise par entreprise, les choses peuvent se retourner.
Quels sont les risques spécifiques liés aux entreprises familiales ?
Chez Mon Partenaire Patrimoine, nous en identifions trois principaux :
- le risque de ne pas prendre assez de risques. Même si elles sont généralement fortes en R&D, les entreprises familiales sont généralement très prudentes dans leurs décisions d’investissement, et ont des contraintes de distribution qui peuvent pénaliser leur prise de risque. Cela peut les conduire à rater des virages stratégiques, à refuser un endettement ou une nécessaire ouverture du capital pour « garder le contrôle à tout prix ». Il y a d’ailleurs une majorité d’entreprises familiales qui ne survivent pas à la 3ème génération.
- le risque d’opacité : le contrôle familial peut conduire à un manque de transparence sur la stratégie / la prise de décision, ou à des décisions non rationnelles : par exemple, privilégier un dirigeant issu de la famille lors des phases de transition managériales, au mépris de la compétence. Une statistique intéressante, datant de 2017, montre qu’aux États-Unis, 71% des mises en cause par la SEC (le gendarme boursier) concernent des entreprises familiales, particulièrement de fondateurs. Bien sûr, toutes les entreprises familiales ne ressemblent pas à « Family Business », la série de Canal + sur la famille de bouchers devenus dealers, mais il faut être vigilant !
- le risque de conflits d’agence entre les actionnaires familiaux et les minoritaires ou entre actionnaires familiaux : un exemple fréquent est la captation déséquilibrée de valeur par le biais des salaires ou avantages des dirigeants familiaux ou les conflits entre actionnaires familiaux à mesure que les familles grandissent et que la propriété du capital se dilue entre un grand nombre d’actionnaires.
La gouvernance : LE facteur clé de mitigation de ces risques liés aux entreprises familiales.
Comme souvent en matière de business, le facteur clé est le suivi dans la durée de la gouvernance pour vérifier :
- la transparence des processus de décision
- la présence réelle de personnalités indépendantes dans les organes de décision
- la séparation des fonctions de présidence et de direction générale
- l’existence d’une organisation adaptée à la gestion des relations entre actionnaires familiaux et de nature à assurer la liquidité entre eux
Pour aller encore plus loin, nous ajoutons trois zones de vigilance particulière :
1/ Repérer ce que nous appelons « le moment de bascule », où le mode de financement de l’entreprise ne correspond plus à la situation.
C’est le moment où l’entreprise a besoin de faire des investissements élevés pour assurer sa pérennité, en reprenant des risques.
Cela peut nécessiter de réduire, voire supprimer temporairement les dividendes et de faire appel à des capitaux externes via une introduction en Bourse ou un appel à des fonds d’investissement. Et si cela coince dans la gouvernance familiale, alors il est prudent pour l’investisseur de prendre ses jambes à son cou.
2/ Surveiller la satisfaction au travail et les conflits sociaux. Une étude de 2017 montre que les entreprises familiales sont plutôt mieux notées sur Glassdoor, connaissent moins de situations de conflit sociaux, et que ces derniers durent moins longtemps.. C’est, par exemple, l’approche retenue par le fonds thématique Happy at work de Sycomore Asset Management.
3/ Enfin, et vous savez que c’est un sujet qui nous tient à cœur, nous regardons toujours les entreprises sous l’angle de l’actionnariat salarié. Les entreprises familiales qui ont ouvert leur capital, au moins de façon ciblée à leurs hommes et femmes-clés, et parfois de façon collective à tous leurs collaborateurs, sont des entreprises qui ont généralement une gouvernance de qualité. Elles ont, en effet, par ce biais prouvé :
- que les actionnaires familiaux ont accepté de se diluer pour associer leur corps social à leur création de valeur. Pour caricaturer, on pourrait dire que les actionnaires familiaux, y compris oncle Roger et Tante Germaine, héritiers sans responsabilité opérationnelle, ont compris et accepté qu’il vaut mieux être propriétaire de 95% d’une entreprise qui va croître de façon pérenne que de 100% d’une entreprise qui va mourir faute d’attirer et retenir les bons managers
- qu’elles sont disposées à faire preuve de transparence, au moins en interne, sur les chiffres, la valorisation et la performance
D’accord, les entreprises familiales dont la gouvernance est irréprochable surperforment. C’est une thèse d’investissement tentante. Mais si on est un épargnant, on fait comment pour jouer cette thématique ? Pas facile de discerner les entreprises familiales bien gérées. Et puis il y en a quand même une majorité qui sont non cotées ?
Quand on a une thèse d’investissement valable, il est rare que le marché ne fournisse pas une solution.
Commençons par le non coté : les acteurs du Private Equity aiment beaucoup les entreprises familiales. Grâce aux efforts de « retailisation » des fonds, un épargnant peut désormais accéder pour des tickets modestes au Private Equity, en direct, sur son PEA ou via son contrat d’assurance vie. Il suffit de se renseigner sur les filtres appliqués par les fonds d’investissement que l’on vous propose pour savoir s’il y a un biais en faveur des entreprises familiales ou pas.
En coté, il faut dire que l’univers des entreprises familiales est très large et profond. Il y en a sur tous les continents, beaucoup plus que les 1.000 de l’indice du Crédit Suisse. Mais évidemment, il faut pouvoir trier.
Deux façons de le faire. D’abord, suivre les introductions en Bourse des entreprises familiales non cotées. On peut le faire en s’intéressant au coverage d’ID Midcaps, leader de la recherche equity small et mid caps qui couvre toutes les introductions significatives et ne rate pas une intro d’entreprise familiale.
Ensuite, si on veut se reposer sur le savoir-faire des autres, certains asset managers ont développé des fonds thématiques autour de l’investissement dans les entreprises familiales. Il y en a un que nous aimons particulièrement chez Mon Partenaire Patrimoine : c’est le fonds Portfolio Family Governed de Carmignac.
Il coche toutes les cases :
– prise en compte de critères extra-financiers très robuste, matérialisés notamment par le label ISR et le label Vers le développement durable
– portefeuille concentré sur 40 à 50 valeurs et à détention longue
– et surtout prisme d’analyse très pointu sur la gouvernance des entreprises familiales, dont on a vu que c’était un facteur clé de succès :
- indépendance du conseil d’administration
- composition et compétences des comités
- dissociation des organes de direction
- mesures de protection des minoritaires
- équilibre et niveau de la rémunération des dirigeants
Nous aimons bien aussi la légitimité de Carmignac sur cette thématique, s’agissant d’un asset manager familial ayant réussi sa transition d’entreprise d’un fondateur à entreprise familiale à la gouvernance collective avérée.
On trouve, par exemple, dans ce fonds Danaher dans la santé, Estée Lauder dans la consommation, Partners group dans la finance, Dassault Systèmes dans les technologies de l’information, Lennox international – US chauffage/clim-réfrigération dans l’industrie.
Une très grande diversification géographique (monde entier, dont émergents), de taille de capitalisation et de secteurs, ce qui en fait un très bon fonds de fonds de portefeuille à conserver dans la durée. Un bon moyen de jouer très facilement cette thématique des entreprises familiales.
Pour conclure, disons que pour un épargnant, les entreprises familiales, c’est chic !
Chic ? Oui, car le tube « We Are Family » des Sister Sledge, mentionné au début de ce post, a fait l’objet d’une magnifique reprise en 1999 par le groupe Chic. Et c’est aussi une très belle version que nous vous encourageons à écouter !
Pour en savoir plus sur la jolie musique de l’investissement dans les entreprises familiales (et pour nous dire si vous préférerez l’original des Sister Sledge ou la reprise de Chic) : contactez-nous !