La revente de chaussures de sport est devenue un vrai « business » qui peut rapporter gros. À condition de connaître les règles de ce marché très particulier.
Si les montres, le vin ou encore l’art représentent des moyens alternatifs pour placer son argent, ils concernent un public restreint en raison des tickets d’entrée élevés. Un nouveau marché international, qui a vu le jour il y a quelques années, est plus facile d’accès et tout aussi lucratif : la sneakers.
Selon la banque d’investissement Cowen & Co, la revente de chaussures de sport génère un chiffre d’affaires de 2 milliards d’euros et pourrait atteindre 30 milliards d’euros en 2030. Preuve de cet engouement : une paire de la mythique basket « Air Jordan 1 », portée par le célèbre basketteur Michael Jordan lors d’un match en Italie en 1985, a été vendue 615.000 dollars (environ 510.000 euros) en juillet dernier.
Plus récemment, la maison de ventes aux enchères américaine Sotheby’s a réalisé la vente d’un lot de 200 paires de Nike Air Force 1 en collaboration avec Virgil Abloh, décédé en novembre 2021, pour Louis Vuitton pour une valeur d’environ 22 millions d’euros. Pour s’offrir cette paire aujourd’hui, il faut compter près de 300 000 euros. Il s’agit d’un prix non exhaustif qui peut varier selon votre pointure.
Le principe
Attention : toutes les paires de sneakers ne se valent pas et ne permettent pas de dégager un bénéfice. Toutefois, quelques pépites peuvent se cacher dans les greniers des maisons de famille, les solderies et autres brocantes. Même si ce genre de trouvailles se fait rare de nos jours, tant le filon a été exploité.
S’il est uniquement question d’offre et de demande – comme sur les marchés boursiers -, des critères spécifiques sont à prendre en compte avant de se lancer dans l’achat d’un modèle de chaussures destiné à la revente. Si on cherche à acquérir des paires pour les porter, il faut évidemment se baser avant tout sur ses goûts personnels.
Dans le cas où l’achat est réalisé dans un objectif d’investissement, il faut prendre en compte :
- la marque
- le modèle
- la collaboration (l’artiste et/ou la(les) marque(s) qui ont participé au design du modèle)
- la quantité mise sur le marché
- la cote (son prix)
Une fois ces informations récoltées, le travail ne s’arrête pas là.
À l’origine, ces paires étaient mises en vente dans les boutiques des marques ou dans les magasins de chaussures de sport. Le principe du « premier arrivé, premier servi ! » régnait. Cette logique est simple. Si vous trouvez votre taille au moment de votre passage dans le magasin, vous l’achetez. Le plus souvent, la vente est limitée à une paire par personne pour éviter les abus.
Mais ce système a donné lieu à des dérives. Les magasins ont connu des files d’attente de plus en plus longues et de plus en plus matinales, jusqu’à provoquer des scènes de violence pour mettre la main sur les paires les plus rares.
Pour éviter ces débordements, les marques ont mis en place des « raffles », c’est-à-dire des tirages au sort qui donnent droit aux personnes sélectionnées de pouvoir se payer la paire au prix affiché. Pour y participer, il faut se rendre sur les sites ou les applications mobiles des marques ou de revendeurs spécialisés. L’application la plus connue est SNKRS (abréviation de « sneakers ») de Nike, destinées à la branche « rare » des modèles de la marque à la virgule.
C’est à partir de ce moment-là que tout commence.
Ces critères qui rendent les prix plus volatiles
Trois critères doivent être pris en compte pour bien investir dans les sneakers : le modèle bien sûr, la ou les collaborations et la quantité mise en vente.
Le modèle
Critère de base dans la sélection des « cibles », certains modèles provoquent plus de demandes que d’autres. Le marché est dominé par l’empire Nike qui possède plusieurs signatures de renom, comme Jordan ou Converse. Il propose une gamme très large de sneakers permettant de créer des chaussures adaptées à chaque public. Les autres marques réussissent aussi à sortir des modèles intéressants, mais souvent moins médiatisés.
Les prix de lancement sont compris entre 100 euros à 400 euros pour les modèles les plus techniques, voire plus s’il s’agit de marque de luxe (Vuitton, Dior, Gucci…)
La collaboration
Que ce soit avec une personnalité, une marque de luxe ou encore grâce à un concours avec des créateurs, la nature de la collaboration impacte le prix de vente et surtout le niveau de spéculation. Il peut y avoir plusieurs collaborations sur une même paire. Les marques choisissent avec précision avec qui elles vont travailler pour créer l’engouement. Ce phénomène a un nom : « la hype ».
Selon les collaborations, la paire peut donner lieu à une sortie uniquement dans quelques boutiques de certains pays, ce qui rend l’achat très compliqué. Les prix de revente peuvent alors atteindre un niveau très élevé.
La quantité
Critère dominant, la quantité des modèles mis en vente est véritablement décisive. Les paires vendues en série limitée (entre 2.000 et 3.000 exemplaires) se revendent généralement très cher.
Produite à seulement 13.000 exemplaires, dont une partie réservée aux meilleurs clients de Dior, le modèle « Jordan 1 retro High », fruit de la collaboration entre Michael Jordan et la marque de luxe, a été vendu à 2.000 euros en magasin. D’après certains sites spécialisés, comme StockX, la paire se revend jusqu’à… 25.000 euros aujourd’hui !
Obtenir une paire après sa sortie
Compte tenu de la difficulté de gagner le tirage au sort, couplée aux abus des robots qui permettent d’acheter la paire dès sa sortie, il est de plus en plus difficile de se positionner sur certaines collaborations. La seule solution est de racheter la paire à un prix plus élevé que lors de sa commercialisation et de la revendre, plus tard, encore plus cher.
Les reventes sont réalisées via des groupes réservés aux transactions de chaussures sur les réseaux sociaux et sur des sites de revente de vêtements, comme Vinted. Attention, ce marché connaît trois types de fraudes :
- les fausses annonces de ventes
- les changements de politique de dernière minutes de la part du vendeur qui a trouvé une personne offrant un prix plus élevé
- la vente de contrefaçons qui sont souvent difficilement détectables. Les fraudeurs vont jusqu’à imiter les numéros de série.
Si vos sneakers préférés sont affichés à des prix trop élevés pour vous à la revente, vous pouvez toujours attendre. Avec le temps, certains modèles peuvent voir leur tarif baisser.
Vous pouvez également jouer sur les « restock », c’est-à-dire la remise en vente de certains modèles rares. La dernière en date a eu lieu chez Adidas. La marque aux trois bandes a ressorti, fin décembre 2020, des modèles de la collection Yeezy (collaboration entre Adidas et le rappeur Kanye West).
J’aimerais finir cet article par une anecdote qui montre l’instabilité du marché des sneakers. Il s’agit de l’affaire « Lidl », qui a beaucoup fait parler d’elle l’an dernier. En juillet, le hard-discounteur annonce la sortie dans ses magasins belges de trois produits : une paire de chaussures, une paire de chaussettes et une paire de claquettes. L’engouement fut tel qu’en une journée, tous les articles ont été vendus et ont affiché des prix de revente totalement fous. Proposées à 12 euros, les chaussures se sont revendues à 2.000 euros sur certaines plateformes. C’est ce que l’on appelle une belle plus-value !
Les sneakers et les NFT ?
Le principe
Pour rappel, un NFT (Non Fongible Token) est un fichier numérique, le plus souvent une image. L’internaute achète le droit de propriété de ce fichier et la transaction est inscrite dans un cahier numérique (la blockchain), ce qui rend le vol de ce fichier presque impossible. Une fois le premier achat effectué, c’est un jeu de spéculation sur la propriété qui se lance comme pour les titres en Bourse. Certaines images se vendent à des prix fous. Une des plus chères du monde s’est vendue près de 91,8 millions d’euros pour The merge.
Mais quel est le rapport avec les sneakers ?
À priori, il n’y aurait aucun intérêt à comparer les sneakers aux NFT, car ils ont une utilité totalement différente. L’une s’utilise au quotidien quand l’autre reste stocké sur un ordinateur. Toutefois, la récente actualité du metaverse et des cryptoactifs a poussé certaines sociétés à prendre des risques et innover sur des marchés en croissance. C’est le cas notamment de Nike qui a lancé fin 2021 Cryptokick, une chaussure virtuelle associé à des NFT. Pour s’offrir cette paire, il faudra compter aujourd’hui près de 10 000 $. Un prix assez déroutant surtout quand on sait que certaines paires physique atteignent ce prix avec par exemple la Nike Air Jordan 1 et Dior.
Un pari à tenter ?
Les avis divisent. Certains spécialistes vous diront qu’il s’agit d’un bon moyen de rechercher de la performance compte tenu de la rareté et de la volatilité de ces produits. Mais, comme tout pari il y a des risques et ils peuvent être importants. De plus, on peut se poser la question de l’investissement d’une telle somme sur un produit dont on ne pourra même pas profiter.
En résumé, vous pouvez spéculer sur les sneakers pour vous faire plaisir et avec de l’argent dont vous n’avez pas besoin ou qui représente une partie limitée de votre capacité d’épargne ou de votre patrimoine.
Si vous souhaitez que l’on vous aide à déterminer avec quel montant vous pouvez investir et sur quel modèle, faites appel à Mon Partenaire Patrimoine. Nous en profiterons pour parler de votre « cœur de portefeuille » de placements. 😊
À propos de l'auteur
YANIV GUENOUN
Assistant Conseiller en Gestion de Patrimoine chez Mon Partenaire Patrimoine