Couverture de la dépendance : vers un 5e trou de la Sécurité Sociale ? Comment se protéger et protéger les siens ?
Le Gouvernement a donné le coup d’envoi de la création d’un cinquième pilier de la Sécurité Sociale couvrant le risque de perte d’autonomie (« dépendance ») lié au vieillissement de la population. Le cadre fixé est celui d’une centralisation toute jacobine de la couverture de ce risque, dans la grande tradition de notre système de protection sociale. Compte tenu de l’ampleur de l’enjeu, est-ce la bonne façon de s’y prendre pour un pays déjà champion des dépenses de protection sociale et qui a du mal à réformer et équilibrer les 4 premiers piliers de son système ? N’y a-t-il pas d’autres solutions ? Quelles conséquences concrètes cela peut-il avoir sur vos décisions pour votre propre protection et celle de vos proches ? Voici notre analyse.
Le 5e pilier de la Sécurité Sociale risque bien d’être un 5e « trou » et ne suffira pas à couvrir les besoins.
Quand vous serez bien vieille, au soir, à la chandelle,
Assise auprès du feu, dévidant et filant,
Direz, chantant mes vers, en vous émerveillant :
Ronsard me célébrait du temps que j’étais belle…
Personne ne remettra en cause la nécessité d’agir pour améliorer la prise en charge de nos concitoyens en perte d’autonomie. Le célèbre poème du recueil Sonnets pour Hélène de Pierre de Ronsard comptait déjà les effets du vieillissement en 1578, et on peut évidemment trouver dans la littérature de tous les pays de multiples références bien antérieures. Un bref sondage sur l’équipe de Tout Sur Mes Finances et de Mon Partenaire Patrimoine nous apprend que 3/4 d’entre nous ont déjà vécu dans leur premier cercle familial des situations de perte d’autonomie, et nombre d’entre vous aussi.
C’est une évidence et 5 siècles après Ronsard, le rapport dirigé en 2019 par l’ancien directeur de la Sécurité Sociale Dominique Libault nous donne des chiffres très précis sur la réalité de la perte d’autonomie liée à l’âge en France et sur la dépense associée : 2 millions de personnes dont 500 000 en établissement, pour une dépense totale annuelle d’environ 30 milliards d’euros.
Ce qui est préoccupant est la projection : le risque de perte d’autonomie est 5 fois plus élevé après 75 ans. Avec l’allongement de la durée de vie d’environ un trimestre par année, soit un an tous les quatre ans, la fameuse « pyramide des âges » que nous regardions dans nos manuels scolaires nous apprend qu’en 2040, la France comptera 12 millions de citoyens âgés de plus de 75 ans contre 6 millions aujourd’hui. Une simple règle de trois nous donne un besoin de financement doublé à cet horizon de 60 milliards d’euros par an, à prise en charge et taux de perte d’autonomie équivalents. Cela en fera des points de PIB….
L’annonce du projet de flécher vers le financement de la perte d’autonomie dans le prochain Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale (PLFSS) pour 2021 une partie des recettes de la CSG pour un montant estimé à 2 milliards d’euros par an est totalement insuffisante pour couvrir ce besoin. La marge de manœuvre pour monter les cotisations pesant sur les entreprises ou les français est limitée. La Caisse d’Amortissement de la Dette Sociale (CADES) qui vient d’être prolongée de 2024 à 2033 n’est pas prête de s’éteindre car avant même la création de ce 5e pilier le déficit de la Sécurité Sociale dépasse les 50 milliards d’euros (il a été réévalué à 44,7 milliards d’euros lors de la présentation du PLFSS 2021 au mois de septembre).
Une stratégie reposant sur le principe de subsidiarité serait probablement plus efficace mais elle a peu de chances de voir le jour.
Dans ce projet de création d’un cinquième risque à la couverture centralisée, il est probable que le Gouvernement concentrera les ressources sur le renforcement des capacités de prise en charge des Ehpad, déjà plus développées en France que chez nos voisins. Sans rentrer dans les polémiques stériles sur les conditions d’accueil des personnes par ces établissements, dont les personnels continuent le plus souvent admirablement à faire face avec les moyens dont ils disposent à la crise sanitaire, nous nous contenterons de souligner :
- Que la prise en charge de la dépendance n’est pas constituée que de placement en établissements spécialisés. La dépendance arrive le plus souvent par paliers, un certain nombre de prestations (visites, services à la personne, soins ponctuels ou réguliers) peuvent être dispensés dans des établissements de soins publics ou privés, ou à domicile, parfois pendant des années
- Que le maintien à domicile est souvent une solution privilégiée par les intéressés et leurs proches, et peut s’avérer moins coûteux s’il est anticipé
- Que le financement et la géographie des dispositifs seraient probablement mieux gérés à une échelle locale plus fine, celle qui maille le mieux le territoire en termes de lien social et de prestations, que de façon centralisée depuis Paris
- Que le secteur assurantiel « privé » au sens large (assureurs traditionnels, bancassureurs, mutualistes, institutions de prévoyance) est d’ores et déjà capable d’assurer ce risque, avec ou sans réseau de soins intégré. A titre d’exemple des millions de français ont déjà souscrit une assurance dépendance. Ils ont voté avec leurs pieds, probablement parce qu’ils comprennent intuitivement la réalité de ce risque et le risque que la puissance publique ne le couvre pas avec efficacité ou en adéquation avec leurs souhaits d’hébergement. Le devoir de conseil de la distribution est clé pour le développement des solutions adaptées à chaque personne concernée.
Pour se protéger contre la dépendance il faut donc avant tout compter sur soi-même, et le levier de son patrimoine est primordial. Comment choisir les solutions avec les bonnes options ?
Les 5 principaux paramètres à prendre en compte pour évaluer son besoin de couverture contre le risque de perte d’autonomie et déterminer la solution adaptée sont les suivants :
- Age
- Situation de famille
- Préférences en termes de résidence en cas de matérialisation de la perte d’autonomie : des personnes isolées géographiquement de leurs proches peuvent préférer le passage par un ou des établissements adaptés au niveau de dépendance, avec le lien social approprié, plutôt que le maintien à domicile
- Couverture éventuelle déjà existante dans le cadre professionnel
- Surface financière, c’est-à-dire à la fois le patrimoine (immobilier et financier) et la capacité d’épargne/de financement
En fonction de ces paramètres, chaque individu prendra les décisions adaptées :
- Souscription d’une assurance dépendance dédiée ou garantie incluse dans une couverture plus large de prévoyance
- Examen de la capacité à mobiliser de l’épargne ou du patrimoine immobilier pour financer la prise en charge de la perte d’autonomie selon les préférences personnelles (maintien à domicile ou non)
Dans tous les cas le bon sens (et la réalité financière) commande de ne pas souscrire de contrat dédié si la capacité ou le stock d’épargne ou de patrimoine immobilier permettent de couvrir le risque : un soin particulier devra être accordé à rechercher ou basculer sur des solutions offrant la plus grande souplesse en termes de conversion de l’épargne en financement du risque (rente dépendance) si la perte d’autonomie survient. Un champ de conseil à valeur ajoutée significatif pour Mon Partenaire Patrimoine au service de ses clients.