Nous sommes nombreux à collectionner des objets dans des domaines qui nous tiennent à cœur : œuvres d’art, montres, stylos, livres rares… Mais il y a des risques d’arnaque. Comment les éviter ?
Chez Mon Partenaire Patrimoine, nous avons une certaine indulgence pour les profils de collectionneurs d’objets dans des domaines pointus et variés. Il se dit même que l’un de nous collectionne compulsivement les planches à voiles anciennes… Parfois, cette passion devient si importante qu’elle devient une activité d’investissement à part entière, parfois assortie de « paris à la revente ».
Vous trouverez ici nos analyses et anecdotes sur des domaines d’investissement plaisir aussi variés que les Lego®, les jeux vidéo et… les Sneakers.
Parlons-en, du marché des Sneakers ! Il y a eu récemment un cas d’arnaque aux Sneakers d’occasion pour un montant de préjudice de 85 millions de dollars ! L’occasion pour nous de vous alerter sur les risques de fraude et d’arnaques liés à ces investissements atypiques et sur les moyens de les minimiser.
Le procès de Michael Malekzadeh s’est, en effet, ouvert cet été aux États-Unis pour un chef d’accusation très simple : on lui reproche d’avoir arnaqué des milliers d’investisseurs sur le marché de la basket d’occasion pour un préjudice total de 85 millions d’euros.
Comment en est-on arrivé là ?
Cette affaire est un cas très classique de pyramide de Ponzi, exactement comme l’affaire Madoff.
La société de Malekzadeh, Zadeh Kicks LLC, montée en 2013, vendait des Sneakers d’occasion / de séries limitées très recherchées par les collectionneurs, principalement des Nike et des Adidas, à des prix très attractifs, parfois même avant même leur sortie des ateliers des marques.
Parfois il les avait, et pouvait les livrer. Parfois pas. Et celles qu’il pouvait livrer, il se les procurait non pas auprès des marques à prix négocié à l’avance – car il n’avait pas de partenariat avec elles -, mais le plus souvent sur le marché / auprès d’autres revendeurs, parfois à perte par rapport à son prix de vente. Quand il ne pouvait pas livrer, il distribuait en compensation à ses clients déçus des cartes cadeaux. Car pendant ce temps, il avait dépensé leur argent en voitures de sport et autres éléments de train de vie dispendieux. C’est donc l’argent du prépaiement des nouvelles commandes qui lui permettait de continuer sa fuite en avant. Un schéma de pyramide de Ponzi somme toute assez classique, qui s’est immanquablement terminé par un effondrement retentissant.
Comment le pot aux roses a-t-il été découvert ?
La chute a été provoquée par série limitée de Nike Air Jordan 11 Cool Grey, que Nike vendait 225 dollars, et dont Malekzadeh a pré-vendu 600.000 paires à 115 dollars, encaissant 70 millions de dollars en quelques jours. Or il n’a réussi à s’en procurer que 6.000. Le bruit autour de cette affaire a alerté les autorités, et après enquête ces dernières ont saisi chez lui 6,1 millions de dollars en espèces, des montres, des sacs et des voitures, plus de 1.000 paires de sneakers de sa collection personnelle. Son entreprise a fait faillite et son entrepôt, devant lequel il y a eu des émeutes de clients mécontents, a été lui aussi mis sous séquestre car il contenait encore 60.000 paires.
Tous ces biens saisis serviront autant que faire se peut à indemniser ses victimes. Il risque jusqu’à 30 ans de prison.
Quelles sont les leçons à tirer de cette affaire ?
Une unique leçon : dans tous les marchés à enjeux, même dans l’investissement plaisir ou passion, il y a des fraudes et des arnaques et il faut aborder ses investissements plaisir sur ces marchés avec grande précaution.
Nous sommes ici en présence d’une fraude classique que l’on rencontre aussi dans le vin, les montres, les stylos, Lego® : le vendeur vous vend en vous faisant payer à l’avance un produit qu’il n’a pas et qu’il n’est pas certain de pouvoir se procurer, ou qu’il se procurera à perte en fragilisant sa situation financière.
Mais il y a trois autres types de fraude sur ces marchés atypiques dont il faut également se méfier.
- La contrefaçon : vous croyez acheter un original très coté et on vous livre une copie parfois bien faite, mais qui ne résistera pas à l’examen d’un expert. C’est souvent le cas dans le marché des montres, par exemple
- Le mensonge sur la qualité et l’état du bien que vous achetez : vous voyez arriver un bien usé, rayé, marqué, ou sans son emballage d’origine que l’on vous avait promis, par exemple
- La vente en série d’un bien qui donnera lieu à envoi en point relais d’un colis vide que vous mettrez du temps à aller chercher, le délai épuisant vos voies de recours contractuelles
Alors comment ne pas se faire avoir ?
En respectant un certain nombre de règles de bon sens, j’en identifie cinq. Mais peut-être nos internautes pourront-ils compléter la liste ?
- Règle numéro 1 : n’intervenir que sur les marchés de biens atypiques sur lesquels vous avez développé une expertise, parce que vous êtes un passionné de longue date ou parce que vous investissez du temps pour comprendre et vous documenter. À défaut, déléguez à des experts. Cette règle est exactement comparable à l’investissement classique : qui achètera une action ou un bien immobilier au pif sans avoir fait son analyse de la qualité de l’entreprise et de ses perspectives ou du bien sur son marché ? Sinon, on délègue à des gérants actions.
- Règle numéro 2 : n’achetez que des objets qui vous plaisent, donc que vous aimeriez conserver en collectionneur si vous n’arrivez pas à les vendre. Le plaisir sera là, à défaut de la performance !
- Règle numéro 3 : limitez votre risque en montant. Cela vaut pour les sommes globales de votre épargne financière que vous consacrez à cet investissement plaisir, mais aussi pour la concentration de ce que vous y consacrez : ne pas tout miser sur un objet très cher en espérant faire un coup, diversifiez et répartissez !
- Règle numéro 4 : achetez des objets en bon état, si possible dans leur emballage d’origine. Ils ont plus de chances de conserver / gagner de la valeur
- Règle numéro 5 (et c’est la plus difficile) : ne traitez qu’avec des vendeurs sérieux !
Dans le cas de Malekzadeh, c’était difficile à repérer notamment pour ses premiers clients qui avaient été satisfaits… et espéraient que cela continuerait.
Il y a ici à la fois des moyens de vérification et des alertes à ne pas ignorer :
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- S’assurer de l’existence du vendeur et de son rating sur les réseaux sociaux. Pas d’avis clients ni de référencement : passez votre chemin. Présence d’avis défavorables : abstenez-vous !
- Vérifier que l’annonce n’est pas dupliquée sur de nombreux sites
- Se méfier des propositions manifestement trop attractives en prix par rapport au prix de marché
- Contacter le vendeur pour discuter de la provenance, de l’état de l’objet convoité et des conditions de transport avant l’achat, obtenir la facture d’achat originale
- Ne pas traiter avec des vendeurs de pays / des plateformes de paiement trop exotiques
- Ouvrir le colis avant de signer l’accusé de réception pour s’assurer de son contenu
- S’assurer des conditions de remboursement / garanties et privilégier les achats intermédiés par des plateformes qui engagent leur responsabilité / auditent les vendeurs
- Si possible, privilégier l’achat en boutique physique à des revendeurs spécialisés et le paiement à la réception ou le complément de paiement à la réception
- Partir en courant si, en cas d’échec de la transaction, on vous propose autre chose qu’un cashback
Ces règles de bon sens pour éviter les arnaques devraient vous permettre de vivre votre investissement plaisir sereinement.
Allez, pour finir, deux anecdotes croustillantes chinées dans nos recherches, moins énormes que l’affaire Malekzadeh, mais révélatrices des risques :
- Une boîte de Lego® Titanic très rare vendue 400 euros des centaines de fois à des gens qui ont payé et n’ont jamais reçu leur objet par un vendeur qui avait placé son annonce sur des dizaines de sites différents
- Un tableau du célèbre peintre Sérusier, vendu par une grande maison de vente aux enchères à Londres comme une « œuvre unique », titré, signé et daté, qui s’est avéré un bidouillage à partir d’une vieille toile du bon peintre, mais en mauvais état dont une partie sauvable avait été découpée ré-enchâssée avec imitation de la signature du peintre et rajout d’une date maximisant la valeur (année où Sérusier a côtoyé Gauguin sur place)
L’investissement plaisir, c’est du plaisir mais aussi de l’investissement. Donc du travail !
Nous vous écouterons toujours avec plaisir nous parler de vos achats passion. Mais nous sommes là aussi pour le reste de votre patrimoine. Contactez-nous !